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La plupart des histoires ont un début, un milieu et une fin. Communauté a un début, un milieu et une suite.

À Ottawa, la tradition d’accueil de réfugiés remonte très loin et inclut, au fil des ans, l’arrivée de centaines et de milliers de gens de Birmanie, du Congo ainsi que de Colombie, du Kosovo, de Somalie, du Vietnam et de Hongrie, des gens qui fuyaient la guerre ou la persécution et sont arrivés jusqu’à la capitale du Canada. Notre communauté est riche des histoires d’anciens réfugiés qui ont pris racine ici, revitalisé certains quartiers, élevé de futurs chefs de file et tissé les fils de leurs traditions dans notre tissu social.

Mais cela faisait un moment – presqu’une génération – qu’un grand groupe de réfugiés n’était pas arrivé parmi nous, sous le feu des projecteurs. L’intérêt public pour les réfugiés avait faibli. Le parrainage privé, une innovation canadienne qui permet à des citoyens ordinaires d’aider des réfugiés à se réinstaller, survivait à plus petite échelle grâce à des bénévoles dévoués. Les responsables des politiques fédérales continuaient de soutenir les réfugiés en théorie mais, en pratique, les défendeurs des droits des réfugiés devaient se démener pour protéger les services essentiels.

À la fin du mois d’août 2015, les Nations Unies avaient inscrit 4 343 225 réfugiés syriens.

Lorsque les Syriens ont commencé à arriver par vagues dans les pays voisins du leur en 2011, venant gonfler les rangs de l’immigration forcée, déjà massive à travers le monde, peu de Canadiens y ont prêté attention. Mais pendant l’été 2015, la crise mondiale des réfugiés est devenue omniprésente dans les nouvelles. Nos écrans se sont remplis d’images de gens marchant péniblement sur des routes de campagne, chargés de tous leurs biens, de canots prenant l’eau débordant de Syriens, d’Irakiens, d’Afghans et d’Erythréens essayant de traverser la Méditerranée, de sauveteurs récupérant les cadavres de ceux qui ne s’en étaient pas tirés. À la fin du mois d’août 2015, les Nations Unies avaient inscrit 4 343 225 réfugiés syriens, la Syrie devenant le plus grand producteur de réfugiés au monde.

Au Canada, isolé de l’urgence de la crise migratoire européenne par sa géographie, on a commencé à parler de plus en plus fort et avec de plus en plus d’insistance d’aider les Syriens. Puis, le 2 septembre, la mer a déposé le corps d’un petit garçon de trois ans sur une plage turque. Il s’appelait Alan Kurdi et c’était un réfugié syrien. Avec son t-shirt, son short et ses sandales, il aurait pu être notre enfant – littéralement. La tante d’Alan, à Victoria (C.-B.) avait essayé de parrainer sa famille mais, le processus étant long et compliqué, les parents avaient perdu espoir. Ils avaient décidé de traverser la Méditerranée dans un canot surchargé et seul le père a survécu.

La photo tristement célèbre du corps d’Alan sur la plage, aussi douloureuse et bouleversante soit-elle, a tout changé. Passifs jusque-là, les Canadiens sont passés à l’action quasiment du jour au lendemain, s’organisant dans leurs communautés tout en exigeant bruyamment de leurs leaders qu’ils fassent quelque chose eux aussi. Le partenariat privé s’est rapidement développé et les dons ont afflué dans les organisations d’installation et d’aide humanitaire. Rapidement, le nouveau gouvernement s’est engagé à faire venir 25 000 Syriens dans les prochains mois, plus du double du nombre annuel accueilli par le Canada en temps normal.

Dans toute cette excitation, nous ne savions pas combien de Syriens viendraient à Ottawa mais une chose était claire : beaucoup de gens allaient arriver en peu de temps et il fallait passer à la vitesse supérieure. C’était un moment comme il n’en arrive qu’un par génération, un défi que la communauté a accepté avec enthousiasme.

L’effort a commencé pendant l’automne 2015 et a continué à pleine vitesse pendant tout 2016. Nous avons fait don de vêtements, de mobilier, d’argent et de compétences. Nous nous sommes proposés pour accompagner en voiture, nettoyer, chercher des appartements, peindre et organiser. Nous avons consacré de nombreuses heures à prodiguer des soins médicaux, des services d’installation, une aide juridique, des services d’interprétation et un soutien logistique. Nous avons rempli des formulaires, cuisiné de la soupe, construit des sites Web et coordonné nos efforts. Par moments, on avait l’impression que la ville entière touchait d’une façon ou d’une autre la vie d’un Syrien nouvellement arrivé.

Il n’y a pas eu que des réussites, loin de là. Il y a eu des frustrations, parfois, alors que les organismes en place avaient du mal à faire face à la multiplication des demandes et que des intervenants inexpérimentés tentaient d’aider ou quand des services, donateurs et gouvernements peinaient à trouver comment collaborer. L’attention des médias était intimidante pour les nouveaux arrivants et ceux qui travaillaient avec eux et, pendant ces premier mois, nous avons clairement vu tout ce que nous pouvions offrir mais aussi tout ce que nous ne pouvions pas offrir, à commencer par un nombre suffisant de logements abordables.

Le fait de faire une place parmi nous aux nouveaux arrivants a toujours fait d’Ottawa un endroit meilleur.

Maintenant, le recul nous permet de voir que nos réussites, individuelles et collectives, ont largement dépassé nos difficultés. Le fait de faire une place parmi nous aux nouveaux arrivants a toujours fait d’Ottawa un endroit meilleur et l’accueil des Syriens ne fait pas exception. De nouvelles relations sont nées entre voisins, entre organisations, entre groupes confessionnels. Des partenariats qui existaient déjà sont devenus plus forts et plus étroits. Des services qui se sont développés pour mieux servir les nouveaux arrivants ont appris à mieux répondre aux besoins de tous. Des employeurs accueillent avec enthousiasme les nouveaux venus et leurs talents, des enseignants ont acquis de nouvelles compétences et comprennent de nouvelles choses et des citoyens ordinaires ont une vision mieux informée et plus nuancée du monde.

Ce site Web est consacré exclusivement au récit des histoires de cette aventure. Si vous faites partie de l’effort d’installation des réfugiés syriens, nous espérons que, repensant à votre expérience, vous vous reconnaîtrez dans ces vignettes. Mais ce n’est que le début. Nous aimerions que ces récits vous inspirent et vous donnent envie de raconter votre histoire en l’affichant sur la page Facebook de Réfugié 613.

Écrivons ensemble le prochain chapitre de l’histoire des réfugiés à Ottawa.

Si vous n’avez pas participé à l’accueil des Syriens et craignez d’avoir laissé passer l’occasion, sachez que l’on a encore besoin de vous. Des réfugiés continuent d’arriver chaque semaine, certains pour se réinstaller, d’autres pour être protégés à leur arrivée. Ils viennent du Burundi, d’Érythrée, de Somalie, de Colombie et du Congo et ils ont besoin de notre soutien tout autant que les Syriens en avaient besoin. Vous pouvez encore parrainer, aider bénévolement, faire des dons, organiser et accueillir – consultez le site Web d’une organisation d’installation de réfugiés ou www.refugie613.ca pour trouver des pistes et des contacts pour vos premières démarches.

Si le rythme effréné de 2016 s’est calmé, ce n’est pas une raison pour laisser faiblir l’esprit d’hospitalité d’Ottawa. L’ampleur de la crise mondiale des réfugiés est telle que nous devons continuer à faire notre possible pour offrir l’asile et un nouveau départ aux personnes vulnérables.

Il y a actuellement plus de 21 millions de réfugiés dans le monde. Le HCR estime que 1,2 millions d’entre eux ont besoin d’être réinstallés cette année, leur situation étant tellement précaire que leur vie est en danger.

Le Canada a réinstallé au total 40 000 Syriens dans les derniers 18 mois et ici, à Ottawa, nous en avons accueilli plus de 2 100 ainsi que plusieurs  centaines de réfugiés d’autres pays. Nous sommes fiers de ce que nous avons fait, à juste raison.

Comme le démontrent toutes ces histoires de gens ordinaires faisant des choses extraordinaires, ensemble, nous pouvons déplacer des montagnes. Écrivons ensemble le prochain chapitre de l’histoire des réfugiés à Ottawa.