La famille Lababidi Mohammad, Farzat, Sarah et Shahed
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Sans cette histoire, aucune des autres histoires n’aurait été écrite.
La famille Lababidi, comme des centaines de milliers d’autres, n’était pas en sécurité chez elle en Syrie. Ils n’avaient pas vraiment le choix, il fallait partir.
Mohammad, ingénieur civil, et Farzat, pharmacienne, vivaient avec leurs deux filles, Sarah et Shahed, dans un appartement à Damas. La mère de Farzat et le frère et les sœurs de Mohammad vivaient dans le même immeuble.
« Après le début des manifestations en Syrie, en 2011, il a commencé à y avoir beaucoup d’explosions autour de chez nous. Nous avons commencé à réfléchir à un endroit où nous serions en sécurité. La goutte qui a fait déborder le vase a été une forte explosion à la pharmacie de Farzat », explique Mohammad.
« Mes sœurs étaient parties en Jordanie depuis plusieurs années, ajoute Farzat. Alors nous avons décidé de les rejoindre et de rester là-bas jusqu’à la fin de la guerre. » Mohammad continue leur récit. « Nous y sommes restés à peu près quatre ans, mais il n’y avait rien à faire là-bas. Vous ne pouvez pas conduire. Vous ne pouvez même pas faire une demande de permis de conduire, juste parce que vous êtes Syrien. »
Sarah et Shahed n’étaient pas autorisées à aller à l’école publique en Jordanie et la famille a donc puisé dans ses économies pour payer leurs frais de scolarité dans une école privée. Ils ont fini par décider qu’il était temps de partir ailleurs.
« Nous avons décidé de trouver un autre endroit, où nous serions plus en sécurité, dit Mohammad. Mon frère m’a envoyé un formulaire de demande pour le Canada. Ils ont trouvé quelqu’un pour nous parrainer. L’église a envoyé notre demande au gouvernement le 19 février. Deux jours plus tard, nous avons reçu un appel pour nous dire que nous avions une entrevue le lendemain. C’était fou, personne n’arrivait à le croire. »
Un mois et demi plus tard, les Lababidi atterrissaient au Canada, dans le cadre du traitement accéléré des demandes de parrainage de Syriens du gouvernement.
« Ce que nous avons ressenti est indescriptible », dit Farzat.
La vie est pleine de grands moments et de grandes décisions. Venir au Canada était une grande décision. C’était une bonne décision.
« D’abord, nous avons eu peur. Une nouvelle vie. Une nouvelle culture. Une nouvelle langue. Nous ne savons pas comment expliquer. Après, de jour en jour, nous avons commencé à nous sentir chez nous. Nous aimons beaucoup le Canada et espérons que tout se passera bien pour nous », ajoute Mohammad.
Un an après leur arrivée, les Lababidi vivent dans un petit appartement confortable. Les photos et les bibelots qui ajoutent de la couleur dans beaucoup de foyers sont clairement absents mais leur immeuble est à deux pas de l’école de Sarah et il y a un terrain de jeux tout près.
Même s’ils ne parlaient pas anglais avant d’arriver à Ottawa, après 11 mois de cours de langue, Farzat et Mohammad s’expriment bien. Toute la famille est timide quand il est question de parler anglais, mais leur aisance dans leur nouvelle langue est remarquable. Les filles, qui ont maintenant 14 et 8 ans, réussissent bien à l’école et rêvent toutes deux de devenir docteures.
Farzat fait un stage dans une pharmacie locale. « C’est à la fois une formation et du bénévolat. Les médicaments sont les mêmes, c’est les systèmes qui sont différents », explique-t-elle. Mohammad envisage de refaire une formation mais veut d’abord améliorer ses compétences linguistiques avant de prendre une décision.
Ils sont en contact avec la famille de Farzat sur Skype – sa mère et une de ses sœurs sont en Jordanie, une seconde sœur est en Arabie Saoudite et son frère est au Liban – et ils espèrent pouvoir un jour être à nouveau ensemble.
« Tout nous a surpris, dit Mohammad. Les Canadiens sont tellement amicaux. Nous ne le savions pas, avant. Nous sommes surpris par tout ce que le gouvernement et les Canadiens font pour les réfugiés, pour les aider è commencer leur vie au Canada. »
« Des fois, je m’inquiète pour l’avenir. Pour mes filles. Pour moi et mon mari, dit Farzat. Mais d’autres fois, je me sens bien ici parce que nous sommes en sécurité. Nous n’en espérions pas tant. C’est mieux que ce à quoi nous nous attendions. »